Echo de la Mostra del cinema di Venezia 2023

Six films visionnés dans un cinéma de Venise projetant les films de la compétition.

Trois “Coups de cœur” !

1- Evil does not exist ! (titre qui peut être différent avec la distribution française) de Ryusuke Hamaguchi

Une traversée de la forêt qui mène à un long plan séquence sur un homme qui méthodiquement et tranquillement coupe du bois. Ensuite, il va faire provision d’eau à la source. Takami voit et vit la nature au rythme des saisons. C’est un homme de peu de paroles. La petite communauté du village de montagne est convoquée à une réunion.

Une agence venue de Tokyo se propose d’installer un camp pour permettre à des tokyoïtes de faire des séjours en contact avec la nature. Projet rejeté par les habitants pour des motifs écologiques : consommation d’eau, pollution de l’environnement par les eaux usées.

Hamaguchi s’aventure avec simplicité sur le terrain de l’écologie et le film prend une dimension de fable. Les communicants du projet reviennent mais ils se laissent prendre par le charme de la vie en plein air et du travail quotidien.

Le spectateur se laisse, lui aussi, entraîner dans le quotidien de la communauté autour de Takami et de sa petite-fille.

Un rythme apaisant, une bouffée d’air frais !

Hamaguchi a eu le Lion d’argent – Grand Prix du Jury

2 -Io capitano de Matteo Garrone

Petit rappel, Garrone est le réalisateur du magnifique Gomorra et de Dogman entre-autres films.

Deux amis adolescents, sénégalais rêvent de Paris ; ils préparent leur départ sans en parler à leur famille.

Nous suivons leur traversée où ils découvrent la violence, la cruauté, les souffrances.

Garrone choisit de faire percevoir les pensées, les peurs, les sentiments des deux jeunes, leur capacité d’adaptation et surtout l’impossibilité de l’un à continuer son chemin sans retrouver son ami. Pour sauver son copain retrouvé blessé, Sam accepte l’impossible.

Un scénario qui donne une humanité aux migrants qui ne sont que des nombres dans les statistiques.

Quant à la mise en scène, Garrone révèle une stupéfiante maîtrise des foules, dans le désert, dans la prison libyenne et sur le rafiot surchargé.

Un film dont on ne sort pas indemne même si on connaît beaucoup de choses sur les péripéties des migrants.

Garrone a eu le Lion d’argent du meilleur réalisateur.

Le protagoniste principal, le jeune Seydou Sen, a reçu le Prix Mastroianni du meilleur espoir.

(Sortie Nationale en France: 3 janvier 2024)

3- The snow léopard de Pema Tseden

Présenté hors compétition. Pourquoi ai-je choisi ce film ?

J’ai gardé le souvenir de Tharlo, le berger tibétain et de Balloon, films tournés sur le plateau tibétain entre réalité et fantastique.

En mai, j’avais lu, dans une revue spécialisée, le décès de Pema Tseden qui est un poète, un écrivain et un réalisateur. Au festival du Cinéma asiatique de Vesoul, nous avions eu la chance de visionner plusieurs de ses films.

Sur une route du Tibet, le spectateur est embarqué avec une joyeuse petite troupe de télévision à laquelle va se joindre un jeune moine avec un appareil photo.

Puis, c’est l’arrivée, au milieu de nulle part, dans une ferme où père et fils se disputent.

Un léopard des neiges qui a tué dix brebis a été fait prisonnier dans l’enclos. Le fils veut le tuer alors que ce magnifique animal sauvage est protégé.

Le jeune moine, avec son objectif, traque depuis longtemps l’animal magnifique (voir les séquences en noir et blanc).

Dimension spirituelle révélée par le regard qui s’établit entre le moine et l’animal.

Par l’échange des regards, au-delà de la violence, le récit devient une fable où l’homme et l’animal sauvage peuvent se tolérer.

Un beau film. Beaucoup d’émotions et une dimension universelle avec l’espoir d’un équilibre entre l’humain et la vie de l’animal sauvage.

Je veux espérer qu’un distributeur fera connaître ce film au public.

Odile Orsini