Soy Cuba

Film soviéto-cubain de Mikhaïl Kalatosov tourné en 1963 à Cuba, sorti en 1964 Noir et blanc 143 minutes

Scénario Enrique Pinera Barnet et Evgueni Evtouchenko

Production Most Film/ICAIC

A l’origine, il s’agit de produire un film de propagande au service du castrisme et du communisme.

L’action se situe à la fin du régime du dictateur Batista au moment de la révolution cubaine qui porte au pouvoir Fidel Castro.

Soy Cuba se compose de quatre tableaux :

-le premier montre les ambiguïtés de la fête dans l’île : expression d’une force vitale et corruption au service des touristes américains incarnée par Betty qui se prostitue pour survivre.

– le vieux Pedro se réjouit de sa récolte de canne à sucre lorsqu’il découvre que tout a été vendu à United Fruit par le propriétaire des terres.

– Enrique, étudiant castriste épargne un tortionnaire qui ne lui fera pas grâce de la vie.

Dans le quatrième tableau, Mariano, d’abord réticent, rejoint la lutte castriste lorsque sa maison est bombardée.

Ces héros du peuple sont représentés par des Cubains choisis par Kalatosov.

Or Soy Cuba déplaît à ses commanditaires : trop poétique, pas assez réaliste : il est interdit dès sa sortie en URSS.

Pourtant Kalatosov avait carte blanche, porté par le succès de Pour quand passent les cigognes, palme d’or à Cannes en 1959.

L’oubli complet dure jusqu’en 1992 : le film de Kalatosov est redécouvert à Telluride puis San Francisco où Scorcese et Coppola enthousiastes en récupèrent la copie et le diffusent.

Aujourd’hui, voir Soy Cuba n’est pas un pensum pour militants : c’est une référence d’originalité et d’audace visuelle pour tous les passionnés de cinéma. Deux plans séquences, celui de la fête et celui des funérailles, emportent l’admiration par leur fluidité et les mouvements incroyables dans l’espace. Kalatosov avait adopté pour ce faire une petite caméra Cameflex éclair maniée avec virtuosité par Serguei Ouroussevski. Le noir et blanc doit son éclat à l’emploi de pellicule infra-rouge.

Les censeurs ont pu juger le film ambigu ; c’est que le cinéaste avait fait le choix de l’audace et de la poésie.

Aujourd‘hui paru en DVD, Soy Cuba a été remis à l’honneur à l’Institut Lumière de Lyon en novembre 2021.

Les 400 coups nous offrent une occasion rare de le découvrir le jeudi 27 janvier (séance unique).

Evelyne Rogniat