2024 – Peinture et Cinéma par Guy Reynaud

Pourquoi cette fascination des cinéastes pour la peinture ? Pourquoi certains d’entre eux, Antonioni, Pialat… ont-ils pratiqué les deux modes d’expression artistique ? Parce que, me direz-vous, peintres comme cinéastes ont choisi de s’exprimer en images. Certes, mais il y a plus.

Le sujet est immense et les pistes d’exploration nombreuses. Je n’en suivrai ici que deux, en laissant volontairement de côté tous ces films où le tableau ou sa reproduction est au cœur du scénario : Lang, The Woman in the window, Godard, Passion. Ne relevant pas non plus l’osmose qui a pu s’opérer entre peinture et pellicule lors de grands mouvements esthétiques : constructivisme (Koulechov, Eisenstein), expressionisme (Wiene, Murnau).

Les deux approches auxquelles je me limite ici avec ces quelques phrases sont le film à valeur documentaire et la biographie romancée, aussi appelée biopic à Hollywood.

Film à valeur documentaire :

Je préfère cette qualification un peu lourde au simple « film documentaire », car elle dépasse les limites de la simple œuvre descriptive et plus ou moins pédagogique. Documentaire de création, dit-on aussi parfois. Voyez Resnais au début de sa carrière consacrant des courts métrages à Van Gogh, Gauguin, Picasso (Guernica) selon un montage, une mise en perspective qui sont la marque de leur auteur. Mentionnons au passage Le Mystère Picasso, (trop) célèbre film performance où on suit la création d’une œuvre de l’artiste pendant les 78 minutes de son enregistrement par la caméra. Citons enfin le tout nouveau Ricardo et la peinture, où Barbet Schroeder sur son ami le peintre Cavallo en montrant comment vie et œuvre sont indissociables. (Le film qui sortira avant la fin de l’année sera programmé aux 400 Coups)

 

 

 

Biographie romancée ou Biopic.

En se limitant aux seuls peintres, c’est de très loin la catégorie qui a le plus inspiré les cinéastes. Internet en signale 73 ! Je ne mentionnerai ici que les quelques- uns que j’ai pu voir au fil des ans. Par nom de peintre et par ordre alphabétique : Cézanne (Cézanne et moi, D. Thompson), Gauguin (Gauguin, Deluc), Frida Kahlo (Frida, Taymor), Klimt (Klimt, Ruiz), Modigliani (Modigliani, Davis), Picasso (Surviving Picasso, Ivory), Renoir (Renoir, Bourdos), Roublev (Andreï Roublev, Tarkovski), Turner (Mr Turner, Leigh), Van Gogh (Lust for life, Minnelli, Dreams, Kurosawa, Van Gogh, Pialat), Vermeer (La Jeune fille à la perle, Webber). Le biopic est un long métrage qui traite de la carrière entière d’un artiste ou d’un épisode marquant de son existence. Le scénario part de ce qui en est connu et privilégie ou invente, pour le meilleur ou pour le pire, ce qui permet de raconter une belle histoire. On ne s’étonnera pas s’il s’est prioritairement repu de destins tragiques, fameux  ou scandaleux en leur temps : cinq Van Gogh, trois Picasso.

C’est bien sûr à cette catégorie biopic qu’appartient Séraphine, même si, exceptionnellement, il s’agit d’une artiste peu connue.

Guy Reynaud

Ce texte est publié en guise d’annonce de deux films prochainement programmés aux Quatre Cents Coups : Séraphine (en collaboration avec le Musée Paul Dini le 12 janvier 2024 à 18 heures) et Ricardo et la peinture (le 26 avril 2024, également en collaboration avec le musée Dini).