RMN de Cristian Mungiu

RMN est la traduction du sigle IRM en France. De quelle maladie souffre la société roumaine et plus largement nos sociétés occidentales en général ?

Cristian Mungiu observe à la loupe celle de son pays en particulier et nous dévoile les dérives et l’absurdité de situations telles que celle de son héros Matthias. Celui-ci travaille dans un abattoir en Allemagne où il est mieux payé que chez lui en Roumanie. Le jour où il se fait traiter de « sale gitan », il repart dans son village où il retrouve son ex petite amie, Csilla, assistante de direction de la seule usine du coin.

Dans ce village de Transylvanie pluriethnique, Roumains, Allemands, Hongrois cohabitent dans une entente plutôt précaire, du moins se supportent-ils. Même un Français, employé par une ONG, s’est installé là pour observer et compter les ours, nombreux dans la région.

Face à la pénurie de personnel due au salaire de misère proposé, la directrice de l’usine embauche trois travailleurs sri-lankais, ce qui déclenche une levée de bouclier et une manifestation virulente de la part de l’ensemble de la population.

Le réalisateur construit son film autour de cette situation absurde où les autochtones partent à l’étranger pour un meilleur salaire mais où ceux qui restent brandissent leurs protestations indignées et xénophobes contre l’embauche d’étrangers chez eux.

Une réunion de la population organisée à la mairie donne lieu à un plan séquence de 17 minutes, extraordinaire de maîtrise et d’organisation de la part du réalisateur et aussi des techniciens. Le résultat est surprenant ! Le spectateur a réellement l’impression de se trouver au milieu de cette assemblée où tout le monde veut parler, où chacun veut exprimer son indignation, ses revendications, son refus de voir des « étrangers » prendre le travail !

Les figurants eux-mêmes ont reçu des consignes très précises de la part du réalisateur. **

« Le mixeur a eu un travail titanesque à faire » dit Cristian Mungiu dans une interview. « Ça peut servir de cas d’étude à la Femis » plaisante-t-il.

La fin du film laisse libre cours à diverses interprétations. L’une d’elles pourrait avoir un rapport avec la musique finale, magnifique, empruntée au film de Wong Kar-Wai, « In the Mood for Love ». Peut-être … mais, à chacun son interprétation !

Un grand film à ne pas manquer !

**Voir interview de Cristian Mungiu sur le site de première.fr où il explique son travail en amont et pendant le tournage de cette scène.

Annie Jugie