La séance sera accessible aux spectateurs et spectatrices déficients visuels. Le film bénéficie d’une audiodescription mise à
disposition soit par l’équipement du cinéma, soit sur smartphone via l’application GRETA.
Prêt de smartphones possible pour faciliter l’accès à l’audiodescription.
Cette séance fera l’objet d’une présentation puis d’un échange animé par Ciné-Sens, association qui s’intéresse à l’accessibilité du cinéma pour les spectateurs déficients sensoriels.
Les chiens guides seront bienvenus à la séance.
Documentaire de Carla et Pierre Petit, « À perte de vue » a obtenu deux prix lors du Festival International du Film et du Livre d’Aventure de la Rochelle. Paris Match les a rencontrés.
Carla, 19 ans, cavalière, parle à l’oreille des chevaux. Pierre, son père, chef opérateur et réalisateur, est un professionnel de l’images. Il a travaillé notamment avec Sylvain Tesson. Ensemble, ils se lancent dans un voyage, à cheval, à travers les steppes Kirghizes à plus de 4000 mètres d’altitude. Jusque-là, rien d’extraordinaire ou presque. Seulement voilà : à cause d’une malformation du nerf optique, Carla est malvoyante qui se déplace à l’aide d’une canne ou de sa chienne, Liska. Accomplir ce périple est une perspective de liberté mais également une revanche sur l’impossible. Habituée à capter l’indicible dans le flot d’informations que lui apportent les bruits, les odeurs… Carla se crée sa propre carte mentale, parfois « colorée » par ceux qui lui décrivent ce qu’elle ne voit pas. Les scènes où le père détaille les paysages à sa fille sont d’une beauté intense. Quant à la séquence où Carla galope sur les steppes à perte de vue, elle est tout simplement sublime.
« Quand je suis au galop, je me sens cheval », dit-elle pour décrire sa connexion à l’animal. Pierre filme sa fille sur un fil entre mise à nue et pudeur. Ne pas cacher le handicap mais surtout ne pas le réduire à ce qu’il n’autorise pas mais plutôt à ce qu’il déploie. Carla a grandi dans « un monde semi réel et semi rêvé » comme elle dit. « Si tu ne rêves pas, c’est que tu n’es pas touché par ce que tu vis », affirme-t-elle. Cette jeune femme de 19 ans sublime son existence par son intensité à vivre. Enthousiaste, curieuse, solaire, elle revendique une connexion singulière aux animaux, aux éléments et aux énergies que dégagent les être qu’elle croise sur son chemin. Ce film propose bien plus que de partager l’aventure d’un père et d’une fille, il célèbre une autre façon d’habiter le monde. C’est une ode à la vie ! Un vrai petit bijou !
Carla a reçu le prix de l’aventurière « La Boulangère bio », décerné par le jury féminin. Pour Amélie Grassi, mmebre de ce jury « Le film a pour objet de mettre en avant la façon dont Carla gère sa cécité. Et c’est une aventure en soi. Elle fait également un long voyage dans les steppes de Kirghizie, à plus de 4000 mètres d’altitude en passant des cols incroyables. Il lui arrive de descendre de cheval quand la pente est trop raide et de marcher sans chien et sans canne et elle chute à plusieurs reprises et se relève. J’ai en tête une scène époustouflante quand elle part au galop sur son cheval à flanc de montagne et place toute sa confiance en sa monture… »
Le film a également été distingué par le prix coup de cœur du jury « Sud Ouest ».
Paris Match. Comment est née l’idée de ce film ?
Pierre Petit : Au départ, aucun film n’était prévu. Nous voulions faire un voyage entre père et fille, au moment charnière de la vie de Carla, à l’approche des ses 20 ans à l’aube qu’elle quitte la maison.
Carla Petit : Mais papa a du mal à partir de la maison sans caméra. Alors, nous avons écrit le film ensemble. Nous l’avons co-réalisé.
C’est un immense symbole que vous ayez écrit une œuvre qui donne à voir. Vos phrases sont ciselées et proposent une perception du monde fine et poétique. Le public était debout à la fin de la projection… ému et séduit par la façon joyeuse dont vous habitez le monde.
Carla : Je suis très touchée quand j’entends les applaudissements, quand je sens que les gens se lèvent autour de moi. Nous ne voulions pas d’un film larmoyant ni me positionner en héroïne. Je voulais juste être moi. Et voilà !
Pierre : Ne pas se fermer les portes et ouvrir le champ des possibles est un thème universel et pas seulement dans le cas du handicap. Je voulais mettre en valeur le côté solaire de Carla, sa curiosité qui fait que les personnes que nous rencontrons dans notre voyage s’emparent d’elle et la laisse pénétrer dans leur intimité. Comme cet éleveur d’aigle qui lui confie que masquer les yeux de son animal lui permet de rassembler et de préserver son énergie… et que c’est, peut-être aussi le cas de Clara !
Carla, vous avez un rapport singulier aux animaux en général et aux chevaux en particulier.
Carla : Le cheval est un animal extrêmement sensible. Il possède un corps immense mais peut sentir chaque mouche qui se pose sur sa peau. Je suis très tactile. J’ai tissé une relation de confiance avec eux. Leur présence dans ma vie est très importante. Enfant, j’ai commencé l’équitation par des cours collectifs où on nous demande d’exécuter un exercice les uns après les autres. Personne n’osait s’élancer en premier. Moi, je levais la main. Le professeur devait se dire, inquiet : « si ça se trouve, elle ne voit pas les plots ». Et alors…
Vous avez de l’audace. Rien ne vous fait peur ?
Carla : Si. Pendant longtemps, je n’étais pas sereine quand j’entrais seule dans une boulangerie, avec mon chien. Je dois deviner l’espace et le sens de circulation. Je dois demander que la boulangère me décrive ce qu’il y a sur le présentoir. Il faut que je me rappelle tout et que je choisisse en espérant ne pas faire attendre les autres clients s’il y en a… Parfois, on me fait remarquer que je ne peux pas entrer avec un animal, que c’est écrit sur la porte… je leur répond : « peut-être mais pas en braille… ». Longtemps, ça a été un vrai stress.
On vous sent connectée aux animaux, aux éléments…
Carla : Je collecte toutes les informations, jusqu’à la dernière goutte : les odeurs, les bruits, les énergies… et ensuite j’assemble le puzzle pour créer mon espace mental. Si, en plus, une personne me raconte avec ses mots et sa sensibilité ce qu’elle voit, alors ma perception des lieux est colorée par sa description.
vous avez souligné l’accessibilité de la salle du FIFAV, l’espace Encan à La Rochelle. Pensez-vous qu’il y a encore beaucoup de progrès à faire dans ce domaine ?
Carla : Dans énormément d’endroits, à commencer par le métro parisien, elle est inexistante. Moi, je. Peux encore me déplacer mes ceux qui sont en fauteuil roulant… Alors quand l’accessibilité a été pensée, il faut le saluer.
Le film commence par une audiodescription et une image qui apparait dans un halo au milieu des ténèbres. Le spectateur expérimente immédiatement le champ de vision de Carla. Puis, c’est la voix de Carla qui prend le relais…
Pierre : Très bientôt, ce film pourra être regardé en audiodescription grâce à l’application Greta que chacun peut télécharger sur son téléphone. Nous allons pousser les prochains festivals qui nous programment à mettre ce système en place. Ce documentaire, finalement, est un film militant !
Carla, comment aimeriez-vous conclure ?
Carla : Rêvez car si vous ne rêvez pas, cela veut dire que vous n’êtes pas toucher par ce que vous vivez. Et Soyez vous-même !